Un témoignage extérieur
sur l'état de la grotte de Lascaux
et de ses peintures

(International Newsletter on Rock Art - n° 62)



 Article Pedro Lima
 
Un intéressant article sur Lascaux vient d'être publié dans le numéro 62 de la revue "International Newsletter on Rock Art" dont l'éditeur est Jean Clottes, ancien conservateur général du Patrimoine au ministère de la Culture et de la Communication, président du Comité d'Art Rupestre de l'ICOMOS.

L'article, rédigé par le journaliste scientifique Pedro Lima, relate la visite de la grotte qu'il a faite en juin 2011 en compagnie de Jean Clottes et de Muriel Mauriac (conservatrice de Lascaux) et apporte son témoignage sur l'état de la grotte et de ses peintures.

Ce que décrit l'auteur dans son article en ce qui concerne l'état de la grotte corrobore les témoignages que nous avions pu obtenir indirectement de plusieurs sources. Il ne fait pas de doute que la décision de Muriel Mauriac, fermement appliquée, de limiter les interventions dans la grotte au strict minimum, ainsi que les diverses actions réalisées pour revenir aux conditions de conservation antérieures à la dernière crise (modification de la machine d'assistance climitique dont le fonctionnement actuel est proche de celui de l'ancienne machine dite "de Guyon", reconstruction de la couverture isolante de la Salle des Machines, remise en état des glissières déjà réalisée pour une partie et en cours pour l'autre, ...) ont eu pour effets une evidente et rassurante atténuation visuelle des taches noires et un retour de la vivacité des couleurs des peintures, sans doute liée à une augmentation de l'humidité relative de l'atmosphère de la grotte. De ce point de vue, nous notons avec satisfaction le commentaire prudent de l'auteur qui affirme, au paragraphe 2 de la page 4, que "Le constat visuel du profane retient la bonne santé générale des peintures ...". En effet, bien que l'auteur puisse juger de cette bonne santé par comparaison avec ses souvenirs puisqu'il avait visité la grotte en 1999, donc avant la dernière crise, son constat visuel ne peut permettre d'affirmer que la grotte est guérie et qu'une nouvelle crise n'est pas imminente. Pedro Lima semble en avoir conscience comme le suggèrent plusieurs de ses remarques.

Ce témoignage précis, bien documenté et comparatif d'un visiteur extérieur à la gestion de la grotte, le premier depuis bien longtemps, est précieux pour pouvoir apprécier l'état de la grotte après les phases aigües de crise qu'elle a connues.

Cependant, certains points de ce témoignage méritent d'être discutés, voire corrigés.

- au dernier paragraphe de la page 1, il est écrit que la machine d'assistance climatique "était devenue obsolète ...". On doit se demander selon quel critère. Le qualificatif "obsolète" a été appliqué à la machine de Guyon pour la première fois (à notre connaissance) par Jean-Michel Geneste, précédent conservateur de Lascaux, lors du symposium sur Lascaux de février 2009 en s'appuyant sur le fait que cette machine n'était plus adaptée aux prétendues "nouvelles conditions climatiques extérieures" calculées par le simulateur Lascaux pour la période "actuelle". Cette notion a été reprise à plusieurs reprises par le Professeur Yves Coppens, Président du Conseil Scientifique de Lascaux, au cours des premiers mois de son mandat. Il s'agit là d'une pure spéculation: la fiabilité du simulateur reste très limitée (cf notre analyse du simulateur publiée sur ce site) et les prédictions fondées sur ses résultats n'ont pas été avérées par les faits: contrairement aux simulations, les courants de convection dans la grotte se sont spontanément rétablis dès 2008-2009. Il est dommage que,
sans justification apparente, la machine de Guyon soit à nouveau qualifiée d'"obsolète".

- page 2, premier paragraphe: l'auteur rapporte que le champignon Ochroconis est l'agent causal des taches noires. C'est ce qui a été proclamé (sans nommer l'espèce incriminée) en décembre 2010 par Thierry Heulin, membre du Conseil Scientifique de Lascaux lors d'une conférence de presse donnée par Yves Coppens. Pourtant de sérieux doutes existent encore sur cette affirmation, et il est fort possible que des levures noires soient en fait impliquées dans les dépôts de mélanine (voir le rapport final sur le programme "Ecologie microbienne").

- page 2, premier paragraphe encore: l'auteur indique que "Certaines taches (noires) se développent à proximité des peintures, ou même dessus..." alors que Jean-Michel Geneste a en plusieurs occasions affirmé qu'aucune peinture n'avait été touchée. Cette contradiction mérite d'être levée.

- page 5, premier paragraphe: contrairement à ce qu'affirme l'auteur, aucun des programmes de recherche mentionnés, dont les rapports finaux sont depuis peu accessibles sur la page internet du Ministère (cf notre information du 1er mars), n'apporte la moindre donnée expérimentale ou la moindre preuve d'un "retour à une stabilité climatique et microbienne". La stabilité climatique n'existe pas, car il existe un cycle annuel de changements de température et des variations significatives de la pression de CO2 malgré la machine d'assistance climatique et le pompage du CO2. Et le rapport final du programme "Écologie microbienne" montre clairement que les communautés microbiennes étudiées en divers points de la grotte ne cessent d'évoluer. La notion de "stabilité" à laquelle l'auteur se réfère mériterait donc d'être précisée.

Malgré ces quelques imperfections, cet article mérite d'être consulté par toute personne curieuse du devenir des peintures de Lascaux.

Référence de l'article:
P. Lima (2012)  Lascaux: Retour à l'équilibre, INORA, 62, 1-7.

Non disponible sur internet, l'article peut être obtenu auprès de l'INORA, 11 rue du Fourcat, 09000 Foix - France. L'abonnement à l'INORA, au prix de 20 € par an, donne droit aux trois publications annuelles.

















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